Benoît – Mindless

Benoît regarda sa montre et soupira. Cela faisait seulement quinze minutes qu’il était là, mais l’ennui le traversait de toutes parts. Rien à faire, il n’arrivait pas à s’intéresser, ni même faire semblant. Dix ans qu’il était dans la boîte, dix ans qu’il devait assister à cette fichue réunion de rentrée.

Il comprenait que pour les nouveaux venus c’était essentiel, mais c’était toujours le même discours. Blablabla on est les meilleurs, blablabla on est géniaux, blablabla vous êtes chanceux, blablabla l’entreprise c’est vous, blablabla on va passer une super année, blablabla …

Tous les ans c’était le même cirque ! Ils se baladaient tous dans les couloirs avec leurs étiquettes à la noix, décorées de leurs noms et grades, avant de visser leur fessier sur un fauteuil de la salle de conférence. Ensuite, ils écoutaient les patrons — ceux qu’on ne voyait jamais — se lancer des fleurs pendant une heure. Puis Jean-Mi je n’ai rien compris posait vingt-deux questions plus insignifiantes les unes que les autres, et après une énième slave d’applaudissement ils avaient enfin le droit de profiter du seul apéro offert par la boîte.

C’était quand même bien malheureux d’offrir un unique apéro par an à ses employés, alors que le chiffre d’affaires crevait les plafonds. Mais il n’allait pas trop se plaindre, au moins ils avaient les tickets resto. De vieilles légendes parlaient d’un comité d’entreprise, mais personne ne l’avait vu depuis le changement de direction. Les plus âgés osaient raconter les colonies de vacances, à l’autre bout de la Picardie, offertes par la boîte à leurs enfants. Difficile d’y croire dans l’état actuel des choses. Vu leur grand âge, personne n’osait leur répondre, mais tout le monde s’accordait à dire qu’ils avaient probablement une mémoire défectueuse.

Alors qu’il était perdu dans ses pensées, son voisin lui donna un coup de coude. Benoît leva les yeux vers lui, quelque peu agacé. Son collègue lui désigna la scène du regard. Il vit la responsable du service communication qui jubilait sur l’estrade, la bouche en cœur tendant le micro dans le vide. 

« Allez Benoît, ne faites pas votre timide ! Venez nous rejoindre ! »

Bon. Apparemment, cette année ils ont changé le discours.


Image par 정훈 김 de Pixabay

Autant pour le premier j’ai trouvé très vite l’inspiration, mais pour celui-ci ça a été plus corsé. Au final je suis fière de mon texte, sachant que j’ai commencé à écrire sans savoir où j’allais !

L’Inktober reste quand même un défi dessin, voici mes coups de coeur du jour :

Benoît – Mindless
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